Association Cniid - Centre national d’information indépendante sur les déchets - http://cniid.fr

logo du site Accroche
français français
    FaceBook RSS Ver Youtube   
Newsletter Articles Mailing

Le recyclage, nouvelle caution du jetable
Partager cette page


Le 10 mai 2010,

« Nous avons aujourd’hui plus que jamais besoin d’un changement de paradigme : ne pas produire toujours plus de déchets sous prétexte qu’ils sont recyclés, mais en produire moins et gérer autrement les déchets existants par exemple grâce au réemploi » écrivait le Cniid fin 2008 à l’occasion de la publication du rapport Réduction des déchets : les trois vérités qui dérangent.
Près de 18 mois et notamment un « Grenelle 2 » plus tard, cette loi censée transcrire les paroles en actes concrets de sauvegarde de notre environnement (lire l’article du Cniid), ce commentaire conserve malheureusement toute sa pertinence.

Dans une société fondée artificiellement sur le modèle de l’infini, le recyclage permet en effet de continuer selon la logique du "business as usual" : la bouteille en plastique jetable passe de 100 % de matière vierge à 75 % de matière vierge, sans pourtant toucher à la racine du problème de production massive de déchets, et (presque) tout le monde s’en félicite. L’idée de réellement emballer ou produire autrement est retoquée, repoussée le plus longtemps possible, car un tel changement profond de l’organisation s’avère incompatible avec des intérêts privés à court terme.

Les deux derniers exemples en la matière : le rasoir jetable d’origine française et la dosette de café suisse les plus vendus au monde. Devenus recyclables, en théorie, suite à une initiative volontaire et récente de leurs fabricants, ils se refont une beauté verte et accusent désormais une longueur d’image d’avance sur leurs concurrents dont les produits finissent en incinérateur ou en décharge. Mais un produit à usage unique, donc fortement générateur de déchets, ne pourra pas avoir sa place dans une société tournée prioritairement vers la réduction des déchets. S’accrocher à un produit ou emballage, mal conçu dès le départ du point de vue environnemental, en essayant de l’améliorer à tout prix n’est à notre sens pas suffisant.

Recycler davantage de produits arrivés en fin de vie, c’est bien dans la mesure où nos sociétés modernes ont urgemment besoin de passer d’une organisation linéaire à un modèle circulaire inspiré par les écosystèmes naturels fonctionnant en boucle fermée. L’aluminium s’en sort plutôt bien car ce matériau se recycle à l’infini et deviendra à nouveau de l’aluminium. Le cas est un peu moins glorieux pour le plastique, car si son recyclage réduit la pression sur le pétrole, ce matériau ne se recycle qu’un nombre de fois limité et finira par être incinéré ou enfoui. « Quand on parle de recyclage aujourd’hui au 21e siècle, c’est extrêmement primitif ce que nous faisons. Ces activités de recyclage des déchets encore aujourd’hui, la plupart du temps, sont extrêmement sales, consomment beaucoup d’énergie, consomment beaucoup de matière … » explique Suren Erkman dans un récent documentaire [1].

Nul doute, il faut mettre le paquet sur les techniques de recyclage qui restent largement perfectibles, mais le fait qu’un produit ou un emballage à usage court soit recyclable ne doit pas occulter le fait que la prévention des déchets grâce à des biens durables reste la priorité. Evitons donc les biens rapidement jetables et concentrons-nous sur le recyclage des biens semi-durables (par exemple les vêtements) et durables (meubles, équipements électriques et électroniques…), car il y a déjà largement de quoi s’occuper en la matière.


[1Suren Erkma, fondateur et directeur de l’Institut pour la communication et l’analyse des sciences et des technologies à Genève dans « Ma poubelle est un trésor », film de Martin Meissonnier & Pascal Signolet diffusés le 20 avril 2010 sur France 3.

JPEG - 4.3 ko
This will be shown to users with no Flash or Javascript.