Moins exhaustive que le dossier de presse publié à l’occasion, la version grand public du plan Déchets 2009-2012 explique les grandes lignes de la mise en œuvre des engagements du Grenelle. Le plan pourrait donner l’impression qu’il y a de l’ordre dans les ordures, alors qu’il dénote surtout l’absence d’une véritable politique volontariste qui ose s’attaquer aux produits avant de parler déchets. Voici l’un des passages qui nous inspirent ce commentaire : « En produisant moins de déchets et en faisant de ses déchets des ressources, la France s’inscrit pleinement dans les orientations de la directive [cadre sur les déchets, ndlr] et veut prendre une place dans les pays européens les plus avancés dans la gestion des déchets. » [1]
Dans la France actuelle, est-il concevable de moins acheter ? Peut-on acheter sans jeter ? De nos jours, le citoyen achète et jette, rapidement et facilement. L’obsolescence des biens prend de multiples facettes dans les poubelles : un objet irréparable, un produit dont la date de péremption est dépassée, un appareil pour lequel il devient impossible de trouver la pièce détachée ou encore un vêtement démodé. Le phénomène se traduit alors par une consommation plus quantitative que qualitative. Cette manière de consommer permet certes au PIB de rester en forme. Mais elle est incompatible avec toute tentative de vraie réduction des déchets ménagers et industriels : le découplage de ces deux indicateurs ne s’annonce pas pour demain.
Qu’on le veuille ou non, la solution réside dans la montée en force de la production et de la consommation durables. Si les acteurs en aval, notamment les collectivités, s’impliquent dans la prévention des ordures via les programmes locaux de prévention des déchets, qu’en est-il des industriels en amont ? Pour le Cniid, la prévention des déchets restera au second plan aussi longtemps que les modes de production ne changeront pas. « Réduisons les gaspillages et trions nos choix de consommation avant de trier nos déchets », comme le propose l’Association des Cités et Régions pour le Recyclage et la gestion durable des Ressources [2], constitue une démarche qui relève du bon sens mais est-ce toujours possible en l’absence d’une offre alternative et plus durable ?
La liberté de choix individuel écolo existe–t-elle aujourd’hui ? Autrement dit, à quand le pot de yaourt de 500 g dans les rayons des supermarchés français, la possibilité d’acheter son jus de pomme en bouteille consignée pour réutilisation ou encore la vente en vrac accessible à tous ?
Le Cniid regrette par ailleurs que le plan Déchets utilise la Responsabilité Elargie du Producteur (REP) uniquement comme un moyen d’organisation des filières de tri et de traitement. Rappelons qu’à l’origine, la REP est pensée pour réduire les déchets à la source grâce au transfert de la responsabilité financière et éventuellement logistique de la gestion des ordures des collectivités vers les producteurs. Les industriels sont ainsi conduits à prendre en compte les coûts liés à la fin de vie du produit dès sa conception, ce qui incite à l’éco-conception.
De nos jours, 99 % des ressources prélevées dans la nature deviennent des déchets en moins de 42 jours [3] et un changement de paradigme reste nécessaire pour que nos ressources ne deviennent pas des déchets.
Aujourd’hui, l’urgence n’est plus de devenir un des leaders européens dans la gestion des déchets existants. Alors que nombreux sont ceux qui se contentent de faire de nos déchets des ressources, le Cniid suggère que la France évolue au plus vite vers une référence en matière d’éco-conception et d’écologie industrielle.
[3] Chiffre cité dans Interdépendances n°62 (2006) : L’écologie industrielle. À démarrer sans tarder